Aux Etats-Unis, le phénomène JUUL est un véritable raz de marée, avec une valorisation de 38 milliards d’euros (dépassant au passage celle de Airbnb) et une prise de part de marché record de 70% du marché de la cigarette électronique.
Le marché Français est le 3ème marché mondial et JUUL est bien décidé à prendre sa part du gâteau ! Est-ce Juul réussira-t-il à faire un telle percée sur le marché en France ? Découvrez les raisons qui nous font douter sur la conquête du géant.
Un produit “adapté” contraint par la TPD Européenne
Si Juul est aussi efficace aux Etats-Unis, c’est que là-bas on ne vape pas, on “juul”. Le taux de nicotine très élevé 60 mg en sel de nicotine rend son utilisation très différente, c’est plus un vaporisateur de nicotine qu’une vraie E-cigarette.
Mais les Etats-Unis n’étant pas soumis aux mêmes réglementations qu’en France, le fameux pod dosé à 60 mg/ml est contraint de passer à du 20mg/ml, soit un taux de nicotine trois fois plus bas. L’efficacité ne sera donc pas la même et ses performances insuffisantes ne lui permettent pas de rivaliser avec les concurrents.
Le marketing ne suffira sans doute par à convaincre autant de monde qu’au Etats-unis si le rendu est trop différent.
Un marché mature déjà bien occupé par les “pods”
JUUL ne révolutionnera pas le marché de la vape par la différenciation : les cartouches et les pods existent déjà depuis bien longtemps sur le marché français : le KoddoPod ou bien Lynq de Fuu. Ses concurrents n’ont donc rien à lui envier. Le Kodopod du French Liquide en plus d’être arrivé très tôt sur le marché a un réservoir de 2ml contre 0,7 ml pour Juul. Mais la plus grande menace reste les cartouches Juul compatibles tout droit venues de Chine qui fleurissent sur le marché.
Citons simplement la VAZE, qui est une recharge bien moins chère que la JUUL : une hémorragie dans la fidélisation à l’image de ce qu’a pu connaître Nespresso avec l’arrivée des dosettes compatibles.
Un positionnement prix très élevé
JUUL est aujourd’hui distribué chez les buralistes et les vapeshops. Pourtant le prix de la e-cig est à 29.99€, comparativement à l’offre disponible sur le marché, la différence est très forte. En plus de la batterie, le système de recharge est lui aussi un coût important pour le porte-monnaie des consommateurs ! Si les e-liquides ont une moyenne de 3,90 €/ 10 ml chez les buralistes, et 5,90 € / 10ml chez les spécialistes, JUUL atteint 42.50 € les 10 ml ! Les pods JUUL étant les plus chers à la consommation, ils peuvent être un frein à l’expansion du phénomène JUUL en France.
Selon l’étude Xerfi 2018 la moyenne de consommation des vapoteurs est de 3.5ml par jour, et la quantité est de 0.7ml pour les recharges JUUL.
Il faudrait donc 5 recharges à 2,99€ soit 15€ par jours.. presque 2x le prix d’une consommation de cigarette.
Un associé Marlboro qui fait son bad buzz
Le groupe Altria (Marlboro) aux Etats-Unis a acquis 35% du capital de Juul en investissant dans la start-up. En terme d’investissement, cela permet une propulsion pour la cigarette électronique JUUL. Cependant, l’image du grand cigarettier peut alors dégrader l’image de marque de la start-up étant associé au tabac par les consommateurs. Par conséquent, avoir comme acolyte Marlboro peut êtreun biais relatif à l’intention de santé publique.
En plus des consommateurs finaux, les vapeshops pourront-être frileux de faire rentrer un produit associé au tabac.
Un bagage polémique qui fait de l’ombre à la marque
Aux Etats-Unis, la cigarette JUUL a été au coeur des polémiques pour avoir comme cible principalement les plus jeunes avec un positionnement marketing agressif. En effet, même si ce n’était pas l’effet escompté, JUUL a séduit avant tout une cible très jeune grâce à une communication forte par les différentes plateformes de réseaux sociaux. La FDA a par la suite dénoncé une « épidémie de consommation régulière de nicotine chez les adolescents » (dont 15% se déclarent être des vapoteurs réguliers) (source XERFI).
La cible visée n’était donc pas celle imaginée. Si celle souhaitée était les fumeurs, ce sont les non-fumeurs et les jeunes qui ont été séduits. Cette approche marketing trop agressive aura du mal à s’appliquer en France et la TPD dans l’hexagone sera davantage vigilante pour éviter la propagation du JUUL sur les réseaux sociaux suite à cette polémique.
La culture vapeshop en France est naturellement plus responsable vis à vis des mineurs. À noter que Juul a d’ailleurs récemment essayé de corriger le tir avec son Programme de prévention jeunesse.
Une vape française de plus en plus Geek.
Les vapoteurs plus confirmés auront du mal à adopter la e-cig Juul par la faible capacité de la batterie, des résistances, de la puissance ou encore la contenance des pods ! Cette cible qui recherche la nouveauté et les tendances technologiques va vite être déçue par le manque d’innovation à leur égard. Par la contrainte d’exclusivité, la dépendance forte à la marque, et la faible variété de saveurs, les pods auront du mal à séduire le coeur des middles et des geeks.
Même si Juul a des moyens financiers énormes dans un marché de la vape encore jeune, les acteurs bien en place et les spécificités du marché français vont lui donner du fil à retordre. La stratégie d’uniformisation de l’offre trouve ses limites notamment par une réglementation spécifique. Mais attention, ne sous-estimons jamais l’agilité et la capacité de pivot des Californiens, les entrepreneurs de Silicon Valley ont souvent un coup d’avance et nous ne sommes pas à l’abris d’une JUUL V2 adaptée au marché français. Affaire à suivre…